Monday, February 3, 2014

Devoir de reconnaissance envers Monique Kaboré

                 par André Zouré, Maire de Garango, ville natale de Monique 
     
Monique, une femme au cœur d’or que j’ai côtoyée et appréciée depuis ses origines paysannes, très modeste, que rien ne prédestinait à un avenir plein de félicité et pourtant!


Mariée, Dieu merci, à un instituteur, ils ont évolué loin des conforts douillets des quelques rares métropoles des années 60 à 90, Monique a vite compris qu’elle avait une mission humanitaire à accomplir autour d’elle pour transformer les mentalités rétrogrades d’antan, notamment la condition de ses consoeurs des milieux ruraux.

Ainsi donc, Monique, sans doute grâce à la tolérance de son mari, a démarré, dans les années 70, une mission titanique d’encadrement de ses sœurs de Zoaga d’abord, Zabré ensuite. D’associations en groupements, elle a réussi avec ses qualités exceptionnelles de femme battante à braver les préjugés, oh! combien tenaces et négatifs d’une société qui ne concevait pas la femme en dehors du foyer. C’est justement en partant de cette conception anachronique et négativiste qu’elle a pris le contre-pied de ses détracteurs pour baptiser son œuvre en l’appelant «Pag la yiri»*  (la femme c’est le foyer). C’est comme pour dire qu’elle n’était nullement en porte-à-faux avec les traditions, mais que c’est cette notion absolutiste de la femme maintenue dans l’obscurité et l’obscurantisme qu’elle voulait plutôt effacer du comportement des hommes.

Aussi, en développant le rôle social et économique qu’une femme formée et éduquée peut jouer en faveur de l’émancipation de la cellule familiale d’abord, puis de la société entière, Monique, petit à petit, avec ténacité et patience, a acquis la confiance des uns et des autres et a, au fur et à mesure emporter l’adhésion des plus sceptiques; et le rayonnement des résultats obtenus grâce aux divers projets que ses nombreux partenaires ont appuyés, a fait le reste.

 Au fil des ans, Monique s’est révélée un stratège en matière de développement participatif et une visionnaire de son temps, aidée en cela, il est vrai, par un réseau relationnel riche tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du Burkina Faso, au sein duquel viennent en première ligne, les prêtres de Zabré, Mme «Scho» (Scholastique Kompaoré) comme elle aimait à l’appeler, sans oublier Mme Nignan Marie, qui furent ses meilleures conseillères et guides jusqu’à son dernier souffle.

Aujourd’hui, 10 ans après sa disparition, il est loisible de lui rendre hommage à travers quelques témoignages en guise de devoir de reconnaissance car, faut-il l’occulter? Monique est tombée les armes à la main, oui les armes à la main puisque c’est lors de ses multiples missions à l’étranger que s’est accentué le mal qui la rongeait malicieusement et silencieusement, elle qui n’y accordait pas de l’importance tant elle s’était vouée à sa mission sacerdotale.

C’est donc malgré les efforts de la médecine et le soutien de tant de parents et d’amis que Monique a quitté prématurément ce monde laissant derrière elle ce vaste chantier inachevé et surtout ses nombreux enfants éplorés à qui elle a légué son image de bonne mère exemplaire, qui ne s’est jamais dérobée à ses devoirs maternels malgré le surcroît de travail qui l’absorbait constamment.
Seul le ciel peut être sa récompense.
    
 * Note des Editeurs : Chez les Mossi, "Pag la yiri" est une idée de base. Par ailleurs, le Projet Unesco intitulé "Egalité d'accès des femmes et des jeunes fille à l'education" était reconnu partout sous l'appelation de "Pag la yiri."

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